Ötonöm Février 1999

Lundi 25 janvier 1999, 7 heures du matin à Toulouse, Castres, Gaillac et Béziers, une quarantaine de gens d'armes et gardes mobiles sont sur le pied de guerre afin de perquisitionner les domiciles des membres de la Voodoo'z.

Ils saisissent ainsi tout le matériel de musique (machines de live, platines, tables, skeuds, sono, guitare électrique etc…), tous les véhicules (2 camions, 1 bus et une voiture) et diverses autres affaires personnelles. Cette saisie fut bien entendu effectué sans ménagement et une partie du matériel, entassé à l'arrache dans le bus, est certainement hors d'usage. Le couronnement de l'opération fut une saisie record de drogue illicite, 25 grammes de chichon (pour 15 usagers) et deux bangs!

10 personnes sont ensuite embarquées menottes aux poignets pour 48 h de garde à vue, agrémentées d'un interrogatoire de 66 questions spécialement concoctées pour l'occasion à partir d'ingrédients tels que : écoutes à gogo (plusieurs milliers de conversations piratées sur tous les types de lignes, domicile, parents, portables et même cabines publiques !), plus de 6 mois d'enquête, gens d'armes en civil infiltrés dans la plupart des teufs de la région. Amis teufeurs, attention ! Ils l'ont fait pour la VDZ, peut-être le font-ils aujourd'hui pour vous…

A Albi, le juge d'instruction met par la suite en examen 11 Voodoo'z pour les motifs suivants : " travail illégal, infraction à la législation sur les stupéfiants, ouverture illicite d'un débit de boissons, infraction à la SACEM et agressions sonores réitérées ( !) ". Cette mise en examen est assortie d'un placement sous contrôle judiciaire avec les impératifs suivants :
Obligation d'aller communier tous les dimanches matin à 9h chez les schtroumpfs de leurs domiciles respectifs
Interdiction d'organiser des " free party, rave, afters ou assimilées ( ?) "
Interdiction, surtout, de se rendre dans des lieux où se déroulent de tels évènements !

Le non respect de l'une de ces directives entraîne directement le fautif à croupir en préventive jusqu'au procès.

Des rumeurs, dont certaines hallucinantes, commencent à se répandre, il paraît nécessaire d'approfondir certains points :

" travail illégal "
L'organisation de free tient de la passion, non du travail, et les Voodoo'z ont investi plus d'argent personnel dans les teufs que la Voodoo'z ne leur en a jamais fait gagner, les bénéfices étant intégralement réinvestis dans la soirée suivante (y'a jamais eu besoin de fourgons de la Brink's pour transporter les recettes mirobolantes, les free n'étant pas les raves bourgeoises à cent balles). Les skeuds, instruments de musique et véhicules saisis étant du matériel individuel et non collectif, chaque personne a ici perdu, sans grand espoir de récupération, ce qu'elle avait matériellement de plus précieux.
Impossible de faire de la musique, de se déplacer ne serait-ce que pour chercher du taf, et, en prime, interdiction de sortir.

" infraction à la législation sur les stupéfiants "
Les condés ont reconnu que les Voodoo'z n'étaient pas des dealers, c'est l'usage de résine de plantes vertes qui leur est reproché, ainsi que le fait que les teufs sont considérées comme des lieux favorisants le trafic et l'usage de stupéfiants (à l'instar, faut-il le préciser, des concerts, boites, cafés, maisons des jeunes, raves légales, foyers, etc…).

" ouverture illicite d'un débit de boissons "
l'Etat, dealer monopolitaire de drogue légale (alcool), n'ayant pas touché sa commission, poursuit impitoyablement les indélicats pour quelques francs qui auraient échappés à son contrôle.
Le gros essaiera toujours de bouffer le petit, c'est la loi de la nature.


" infraction à la SACEM "
90% des disques sont édités par des labels indépendants et ne sont pas soumis aux droits d'auteurs pour la diffusion. Ce n'est donc qu'un prétexte de plus pour saisir les disques et empêcher l'expression de nos musiques.


" agressions sonores réitérées "
M'enfin ?!?!


L'objectif premier de l'opération est atteint, la Voodoo'z est pour l'instant hors d'état de " nuire ", le but final étant logiquement d'éradiquer les free parties dans leur ensemble. Les flics se sont empressés de se faire mousser en organisant une conférence de presse bidon, il en ressort que l'affaire actuelle est un test de nouvelles méthodes de lutte contre la délinquance binaire, qui aura valeur d'exemple dans des affaires futures concernant l'organisation de free parties. Si ça continue comme ça, il ne restera bientôt plus que des grosses " teufs " commerciales, organisées dans des lieux aseptisés et puant le fric (boite), entrée à dix sac, sécurité, chiens interdits, etc…(cf Ötonöm 03/98), bref, l'antithèse de l'esprit free, indépendant, convivial, accessible à tous et libertaire par excellence, bref, politiquement pas correct et dérangeant, face au nouvel ordre culturel insipide que le gouvernement voudrait nous faire gober, sous couvert d'une reconnaissance officielle de la culture tekno dont l'apogée est la grosse industrie type Boréalis, Dance Machine et autres love parade.
Incapables d'arrêter les teufs, ils essaient d'arrêter notre futur, ne les laissons pas faire, leur machine est lancée, à nous d'organiser la notre.

Ötonöm n'engage que ses auteurs

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